Une arrivée tardive..

La lune baignait la cour du château
dans une lueur blafarde, rendant les ombres éternelles de ce
pays encore plus inquiétantes qu'elles ne l'étaient
d'habitude. Les gardes royaux, grands et stoïques, vêtus
de longues capes noires et et d'armure tout aussi noires, veillaient
sur le calme angoissant qui régnait en ces lieux. Des lumières
chaleureuses émanaient des fenetres du château, signes
caractéristiques de la nouvelle jeunesse qu'avait apportée
la nouvelle reine en ces lieux ténébreux. Cela l'avait
rendu populaire.. Mais une personne dans le royaume ne voyait pas
d'un bon oeil ces changements...

Le silence pesant fût brisé
par le fracas des sabots ferrés sur le sol pavé de la
cour. Un immense carrosse noir, sans la moindre ornementation,
conduite par un soldat d'allure aussi sombre que la nuit. Il arrêta
le carrosse sous le nez des gardes royaux dont les visages
trahissaientt une étrange peur. Ceux ci se hatêrent
d'aller à la porte de la voiture et s'agenouillèrent,
tandis que le cocher l'ouvrait. Un instant s'écoula avant..
qu'une botte ne s'aventure en dehors du carrosse. Puis une seconde.
Les gardes déglutirent avec peine. Le conseiller était
revenu au château.

Il toisa de son regard froid les gardes
à ses pieds. Aucun n'osait se relever, malgrès leur
courage et leur dévouement. Seul feu le roi aurait pu provoquer plus de
terreur dans le coeur de ses sujets. Hirdannen, grand conseiller du
royaume s'avança d'un pas pressé vers la porte
principale. Derrière lui, les gardes royaux se hatêrent
de reprendre leur poste, évitant le plus possible d'entrer en
contact visuel avec lui. Il poussa la porte sans daigner frapper et
entra dans le somptueux hall. Avec un reniflement de mépris
devant un tel étalage de richesse, le conseiller monta quatre
à quatre les escaliers en direction de la chambre de la reine,
semant derrière lui une agitation propre à la peur
qu'il inspirait.

Général de L'Ombre Nombre de messages : 82 Date d'inscription : 26/09/2007

« Vous en conviendrez ; un telle situation pourrait tout aussi bien… »

Fordrev s’interrompit, laissant le commandant avec qui il conversait dans une pesante attente. En effet, de rapides claquements secs retentissaient dans l’escalier. Et après quelques secondes, Fordrev grimaça. Même si la silhouette n’était pas apparue, le Général aurait reconnu cette présence entre mille ; les pas eux-mêmes avaient le don de mettre mal à l’aise.

Le Conseiller apparut finalement en haut des marches, posant sur l’étage ce regard froid et distant qu’il portait habituellement sur le monde. Fordrev regarda celui qui savait si bien refroidir une atmosphère en quelques instants. Comme à son habitude, Hîrdannen était vêtu d’une longue robe sombre et se mouvait telle une ombre dans son environnement.

« Euh… Monseigneur ? » hésita l’officier. Il ne reçut qu’un geste impérieux lui ordonnant de se taire.

Fordrev n’avait jamais eu l’occasion d’entrer en contact direct avec le Grand Conseiller, leurs rôles et fonctions étant de natures bien différentes. Malgré cela, beaucoup de ses actions avaient relevé une dévotion sans faille envers le précédent monarque, feu le roi Balthus. Elles avaient également relevé une dissidence notoire envers les directions politiques dans lesquelles la reine Ceit guidait actuellement le Pays des Ombres. Peut-être était-ce en réalité l’expression de la nature méfiante du Conseiller.

Fordrev de Montfort et le Conseiller étaient, par le passé, toujours allés dans le même sens concernant les directives que le Pays des Ombres avait à suivre, lesquelles étaient elles-mêmes en accord avec les desseins du roi Balthus. Aujourd’hui, le duc de Montfort attendait le moment opportun où il pourrait mettre Hîrdannen à jour. D’ici là, il continuera d’asseoir son influence personnelle auprès de la reine.

D’un pas hâtif, Hîrdannen s’engageait dans le couloir, en la direction de Fordrev et du commandant. Il devait sans doute se rendre à la chambre royale. Fordrev reporta son attention sur l’officier.

« Continuez de suivre les directives initialement données. S’il doit y avoir des changements à ce niveau, je vous les ferais donner dans les délais prévus », répondit-il finalement.

Hîrdannen aperçut deux hommes en pleine conversation dans le couloir, vêtus comme des officiers de haut rang. L'un était un sous-fifre, un simple commandant revêtant très peu d'importance pour le conseiller. Mais le second était beaucoup plus intéressant, une des rares personnes qu'Hîrdannen appréciait de surveiller. Fordrev de Montfort semblait avoir remarqué la présence du conseiller, son attitude se troublant quelque peu, ses yeux trahissant son stress. S'il avait pu sourire, Hîrdannen l'aurait fait là, mais son caractère l'empêchait de manifester le moindre amusement autre que celui de torturer d'ignobles traîtres, ou d'innocentes fermières éffarouchées.

« euh.. Monsieur ? »murmura l'officier.

Le conseiller vît le petit geste du général du royaume, enjoignant l'officier à se taire. Fordrev l'observait avec respect, crainte et une pointe de curiosité morbide. Peut être était ce justement cette façon si singulière de le craindre qu'appréciait Hîrdannen, que l'on soit curieux de sa nature. Le conseiller se hâta dans la direction de la chambre de la reine, se rapprochant du même coup du général aux yeux noirs.

« Continuez de suivre les directives initialement données. S’il doit y avoir des changements à ce niveau, je vous les ferais donner dans les délais prévus » répondit Fordrev.

Les pas rapides d'Hîrdannen le précipitèrent tel un oiseau de proie sur eux et il braqua son regard inquisiteur sur Fordrev et le commandant, s'arrêtant pile devant eux. Leur attention fût immédiatement centrée sur lui. Ses lèvres s'ouvrirent doucement et il laissa échapper un murmure, de sa voix suave mais dérangeante :

« La Reine est-elle dans ses appartements ? »

Général de L'Ombre Nombre de messages : 82 Date d'inscription : 26/09/2007

Fordrev vit le Conseiller approcher d’une démarche assurée pour enfin se poster devant lui et le commandant. Montfort sonda son regard dont la couleur se situait insensiblement entre l’or et le vert. Une étrange lueur y étincela lorsqu’Hïrdannen demanda :

« La Reine est-elle dans ses appartements ? »

Voyant que le commandant restait comme pétrifié, Fordrev le congédia, joignant un nouveau geste à la parole. « Vous pouvez disposer, commandant. » Ce dernier ne se fit pas prier, s’inclina devant les deux hommes, non sans raideur, puis s’éloigna d’un pas preste en direction des escaliers.

Montfort plongea une nouvelle fois son regard dans celui du Grand Conseiller. Celui-ci arborait une expression des plus neutres, tel un visage de marbre sans imperfection aucune. Fordrev leva légèrement la tête, retrouvant sa distinction habituelle.

« Son Altesse s’y trouve, en effet », déclara-t-il d’un ton guindé. Il laissa quelques secondes s’écouler, puis il pencha imperceptiblement la tête sur le côté et sa paupière barrée de sa cicatrice se plissa très légèrement. Son ton ne changea pas lorsqu’il ajouta :

« À moins bien sûr, que Son Altesse eût décidée de quitter le château pour profiter un instant des charmes de la nature. »

Fordrev attendit de voir si son allusion avait été saisie par son interlocuteur.

Il y avait de ça déjà quelques minutes, la reine avait envoyé son loup royal à la recherche du Général... ce qu'elle ne s'attendait pas... était bien évidement le fait qu'il soit avec le conseiller du royaume ! Donc, Dark, un loup blanc d'une taille impressionnante et à la posture méfiante, approcha des deux Ombres... Alerte, il jeta un regard à demi effaroucher sur le dénommé Hîdannen... n'était-il point celui qui en voulait à sa maîtresse d'être monté sur le trône à sa place ?...
Néanmois, sans plus attendre, Dark retourna son attention au général Fordrev, car n'était-il pas la personne à qui était adressé cette missive ? La colossale créature s'inclina devant lui avec prestence , il déposa la lattre sur le sol et la tira vers lui à l'aide de son museau... Après ce petit tour de passe-passe, l'animal se rassit et attendit patiement...

Général de L'Ombre Nombre de messages : 82 Date d'inscription : 26/09/2007

Il n’y avait pas de doute possible, cet animal était bien le loup blanc de la reine Ceit. Fordrev n’appréciait que très peu les animaux, mais l’animal de compagnie de la souveraine semblait unique de par sa perception et son intelligence hors du commun pour une telle créature. Ce qui laissait souvent le Général indécis sur les réactions à adopter à son égard.

Fordrev hésita un instant, plantant son regard dans les yeux de saphir de l’animal ; ce dernier s’était assis et le fixait. Un message lui parvenant de cette façon ne pouvait provenir que de Milady Ceit. Quelles informations souhaitait-elle lui communiquer ?

Le duc, impassible, retira son gant droit, se pencha et ramassa la missive avant de se redresser. Puis il la déplia pour finalement en commencer la lecture.

Ce que Ceit avait inscrit un peu plus tôt ? Et bien, la lettre est fort simple... dont voici le contenu :

Mon très cher Fordrev,

Me voici fort désolée de ne pouvoir me présenté à mes appartements pour votre rapport. Malheureusement, un imprévu m'est arrivé lors de mon retour au château et voici que je me retrouve en fort charmante compagnie. Pour être plus précise : un charmant chevalier du nom d'Arthan... Peut-être le connaissez-vous ?...
Je voudrais aussi me faire pardonnez pour ne pas vous avoir averti plus tôt de mon escapade nocturne.
Si vous me chercher, je suis présentement avec mon invité, car je l'ai prié de ne reprendre la route que demain matin, ne serait-ce pas normal après tout ? Ne connaissant pas le pays, il serait insouciant de repartir en ces temps, ne croyez-vous donc pas ?
Si vous tenez à me répondre, faites, mon ami, ou sinon venez me rejoindre à la salle à dîner, je n'y bougerai pas.

Sincèrement Vôtre

Ceit

Tout ça ne tenait , bien évidement, qu'à rassurer le général...

Général de L'Ombre Nombre de messages : 82 Date d'inscription : 26/09/2007

Ceit Mcneil a écrit:: Mon très cher Fordrev,

Me voici fort désolée de ne pouvoir me présenté à mes appartements pour votre rapport. Malheureusement, un imprévu m'est arrivé lors de mon retour au château et voici que je me retrouve en fort charmante compagnie. Pour être plus précise : un charmant chevalier du nom d'Arthan... Peut-être le connaissez-vous ?...

Arthan ? Ce nom ne lui disait absolument rien. Ce qui surprenait d’autant plus Fordrev qui connaissait, au moins de nom, tous les aristocrates formant la Cour, fussent-ils de petite noblesse ou bien des chevaliers. Que pouvait bien faire la reine avec un tel individu ? Décidément, Ceit surprendrait toujours le Général. Fordrev craignait que son insouciance la menât un jour à sa perte.

Ceit Mcneil a écrit:: Je voudrais aussi me faire pardonnez pour ne pas vous avoir averti plus tôt de mon escapade nocturne.

C’est bien ce qu’il avait compris. Cependant, elle ne lui avait toujours rien dit sur la nature de cette escapade… Comptait-elle lui en faire part ? Sur ce sujet, sans doute personnel, il souhaitait lui donner l’initiative.

Ceit Mcneil a écrit:: Si vous me chercher, je suis présentement avec mon invité, car je l'ai prié de ne reprendre la route que demain matin, ne serait-ce pas normal après tout ? Ne connaissant pas le pays, il serait insouciant de repartir en ces temps, ne croyez-vous donc pas ?

Si Fordrev était outré, il n’en manifesta rien devant le Conseiller. Néanmoins, il ne s’y attendait absolument pas. La reine se trouvait actuellement avec un étranger ? Que cette jeune adolescente, fine d’esprit et douée, fréquentât la petite noblesse, voire la roture, le Général aurait pu à la limite l’avaler, bien qu’avec grande difficulté… mais un étranger ! C’était, à son sens, intolérable. Le Pays des Ombres s’était toujours suffi à lui-même, de par son évidente suprématie. Feu le roi Balthus avait guidé le royaume d’une main de fer, et la sombre réputation du pays suffisait à dissuader l’extérieur d’oser ne serait-ce qu’une intrusion à leurs frontières.
Montfort devait avoir une sérieuse discutions avec la reine, et le plus tôt possible.

Ceit Mcneil a écrit:: Si vous tenez à me répondre, faites, mon ami, ou sinon venez me rejoindre à la salle à dîner, je n'y bougerai pas.

Sincèrement Vôtre

Ceit

Cette invitation de la part de Ceit finit de persuader Fordrev d’aller voir de quoi il en retournait. Cet Arthan n’était sûrement pas au Royaume des Ombres par hasard.

Fordrev plia la missive, qu’il rangea dans un pan de sa longue cape.

« Réflexion faite, Son Altesse ne s’y trouve pas, Conseiller. Je vous prie de m’excuser, à présent, mais d’urgentes affaires requièrent mon attention », dit-il en regardant le Conseiller qui demeurait toujours aussi impassible.

Son buste s’inclina légèrement, d’un respectueux salut, et Fordrev s’engagea d’un pas ferme en direction de la salle de dîner, sa cape flottant derrière lui. Il ne prit garde de voir si Dark le suivait, sans doute trop soulagé de sentir s'estomper la dérangeante présence du Conseiller.

Le conseiller haussa un sourcil, semblant de pas comprendre l'allusion. Pourquoi ce général tentait-il de faire de l'humour avec lui ? Se pensait-il capable d'adoucir les réactions du conseiller dans le cas où elle n'y serait pas ?

Le général sembla soudainement distrait par quelquechose d'autre et baissa legeremment la tête vers une lettre qui semblait lui être adressée, posée à terre. Le conseiller regarda sans broncher le duc se pencher et ramasser la missive, commençant à la lire, ne la laissant pas dans le champ de vision d'Hîrdannen.

Peut être devrait-il exiger de la voire ? Après tout, cette missive apparaissant subitement à ses pieds semblait pour le moins suspect, et ce qui est suspect concerne le conseiller du royaume. Tandis que le duc continuait à lire, son visage exprima différentes émotions qu'il tenta de dissimuler. Mais comment dissimuler quelquechose à quelqu'un dont la vie se résume à chercher ce que l'on lui cache ?

Le général parla enfin, brisant le silence qui s'était établit entre eux.

« Réflexion faite, Son Altesse ne s’y trouve pas, Conseiller. Je vous prie de m’excuser, à présent, mais d’urgentes affaires requièrent mon attention »

Un salut bref mais courtois et il s'en alla, cherchant manifestement à échapper à la présence inquisitrice d'Hîrdannen. Le conseiller ne dit mot. Il ne lui était pas utile de toute façon de lui poser plus de questions, il savait pourquoi cette lettre l'avait troublé. La Reine devait manifestement préparer quelquechose. Sinon comment expliquer son changement soudain d'avis ? Et son malaise suite à la lecture de la lettre ?

Hîrdannen réfléchit un instant, et s'avança vers la chambre de la reine. Il colla son oreille à la porte, mais ne perçut pas le moindre son. Cherchant dans sa tête les différents refuges de la reine, le conseiller tourna les talons lentement, se dirigeant au rez-de-chaussée. Il n'était pas quelqu'un de pressé, si la reine manigançait quelquechose, il arriverait à temps pour la prendre la main dans le sac.